Pascal COLLET
Nous lisons le chapitre quatre de la deuxième épître de Paul aux Corinthiens.
Par deux fois, ce témoignage revient : « nous ne perdons pas courage ». Ces mots simples doivent nous étonner ; en effet, tant de choses auraient pu faire perdre courage à l’apôtre Paul. Dans la lecture faite, les versets huit à 11 décrivent les difficultés du ministère de Paul. On pourrait ajouter au chapitre six, les versets quatre à 10. Nous avons là un aperçu de son travail, et aussi de sa gloire, de sa recommandation. Avouons-le, pour beaucoup moins que ça ne nous connaissons le découragement. Quelquefois même, nous le justifiions : « avec ce qui m’arrive, c’est normal que je sois découragé ». Or, le témoignage de Paul, et par lui du Saint Esprit, est comme l’inverse de cette justification : nous ne perdons pas courage. Il ne s’agit pas ici de nier les difficultés rencontrées par des bien-aimés, et la souffrance qu’elles entraînent. Mais il est possible que nous adoptions des positions au travers de nos raisonnements, qui nous empêcheraient de goûter une grâce plus excellente, de découvrir ces ressources cachées en Dieu. Mon propos est donc celui-là.
Dans notre marche chrétienne, deux réalités s’opposent : d’abord notre humanité, et aussi la vie du Saint Esprit en nous.
Notre humanité : Jacques dans son épître rappelle qu’Elie le prophète était un homme de la même nature que nous. Nous connaissons le profond découragement qui a été le sien, lorsqu’après avoir affronté victorieusement les prophètes de Baal au mont Carmel, il reçut la menace de Jézabel d’attenter à sa vie. Là, dans le désert, sous un genêt il demande la mort. Là où la Bible Segond dit : Élie… s’en alla pour sauver sa vie », nous pourrions comprendre plus littéralement : «… Il alla à son âme». Cette expression est très évocatrice : nous avons là la réaction naturelle de l’être humain confronté à la déception, à l’opposition, au danger : nous allons à notre âme, c’est-à-dire que dans une sorte de dialogue avec nous-mêmes, nous repassons les choses négatives, nous broyions du noir, nous nous nourrissons d’absinthe et de poison. Voilà notre humanité.
Mais tout n’est pas dit ici : nous vivons la vie spirituelle. Au verset premier de notre lecture, Paul commence par dire : « c’est pourquoi ». Quelle est donc la raison au fait qu’il ne perdait pas courage ? Eh bien c’est ce qui précède notre lecture, au chapitre trois. Dans ce chapitre, Paul leur rappelle l’expérience glorieuse de Moïse dans la présence de Dieu, mais il la rappelle pour mieux montrer que le chrétien de la nouvelle alliance est un privilégié par rapport à Moïse, car le ministère de l’Esprit est plus glorieux que ce qu’a connu Moïse. Ce ministère de l’Esprit est lié à notre communion avec Dieu et nous permet de le contempler et d’être transformé en la même image de gloire en gloire. « C’est pourquoi… nous ne perdons pas courage ». Le ministère de l’Esprit est très vaste, et il touche aussi à ce point de notre personnalité et de notre manière de vivre. Au verset 16 de notre lecture, en rapport avec la deuxième mention du fait de ne pas perdre courage, Paul écrit que notre homme intérieur se renouvelle de jour en jour. Ainsi donc, l’onction de l’esprit, sa présence, son action, son message par la parole de Dieu sont une réalité au même titre que notre humanité. Effectivement, nous avons vu des bien-aimés affligés et pourtant pas découragés, forts, fermes, actifs dans le service pour Dieu. Qu’est-ce qui expliquait cette attitude ? Non pas la force de leur caractère, mais plutôt l’action du Saint Esprit en eux.
Nous évoluons entre ces deux pôles de l’humanité et du ministère du Saint Esprit.D’un côté, nous sommes sensibles à un tas d’éléments, mais de l’autre nous apprenons à vivre par l’Esprit.
Ainsi, nous apprenons à « prendre courage », tant il est vrai que dans ce monde rien n’est facile pour le chrétien. Mais notre part est-elle d’être résignés ? Craintifs ? Défaits ?
Il y a toujours au moins une raison de prendre courage : pour Josué c’était la conquête imminente. Dieu livrait le pays, mais il fallait des coeurs affermis et décidés. Pour Bartimée, c’était le fait que Jésus l’appelait. Pour Jehojada (2 Chroniques 23/1), après un hiver de six années sous le règne de l’impie Athalie, le temps était venu de redresser la tête.
Nous apprendrons encore à « reprendre courage » comme David à Tsiklag (1 Samuel 30/4; 6). Quelle désolation à leur retour, et quelle peur quand le peuple qui restait cristallisera son amertume sur la personne de David en menaçant de le lapider. « Mais David reprit courage en s’appuyant sur l’Eternel Son Dieu ». Le verbe hébreu qui signifie « se fortifier », signifie aussi : se lier, s’attacher, comme la longue chevelure d’Absalom se lia aux branches entrelacées d’un grand térébinthe. Qu’ainsi, le Saint Esprit nous lie davantage à Dieu, au Fils notre Sauveur et Seigneur.