Pascal COLLET
Nous lisons dans l’Évangile de Matthieu, au chapitre six, les versets 19 et 20 ; allons aussi au verset 25, et ajoutons le verset 33. Dans l’Évangile de Luc, au chapitre 18, le verset 30 ; et dans l’Évangile de Jean, au chapitre six, et au verset 27.
Ces paroles de Jésus introduisent une claire distinction. En effet, et pour commencer par le plus évident, le corps est plus que le vêtement, et la vie plus que la nourriture. Il y a une nourriture qui périt, et une qui subsiste pour la vie éternelle. Il y a « ce siècle-ci », et « le siècle à venir ». Il y a la terre et ses trésors, le ciel et ses trésors. Il y a l’homme, il y a Dieu.
Ces paroles de Jésus nous obligent à nous interroger d’abord sur le sens de notre vie, ensuite sur la cohérence de notre foi. Quelles sont nos priorités ? Nos valeurs ? Nos attraits ? Comment évoluons-nous entre les deux « nourritures », les deux siècles, la terre et le ciel ? Cette interrogation est salutaire surtout maintenant : il est incontestable que ce siècle ci, la terre, l’homme, sont des moteurs de l’existence et de ce que nous appelons l’esprit du monde. Nous chrétiens, sommes-nous influencés par cet esprit ? Et si c’était le cas, il y aurait de graves menaces sur la « vie », n’ont pas sur l’existence, mais sur ce que Paul appelle « la vie véritable ». Cette vie, c’est la vie éternelle, don gratuit de Dieu en Jésus-Christ. Celui qui a le Fils a la vie. Il l’a reçu à sa conversion et elle est devenue ce que nous avons coutume d’appeler la vie spirituelle. Il peut y avoir conflit entre cette vie et la vie temporelle.
Je partage une inquiétude : le mode de vie aujourd’hui non seulement ne favorise pas la vie spirituelle, mais y porte même gravement atteinte ; l’accent est donc mis sur l’homme, les valeurs temporelles sont opposées aux valeurs bibliques, un grand conditionnement s’opère, l’évolution des lois et des moeurs ne va pas dans le sens de la vie spirituelle (travail le dimanche…), de plus en plus de contraintes pèsent sur nous et je remarque que des chrétiens sont de plus en plus fatigués. L’une des conséquences de tout cela et que la vie psychique, familiale, et spirituelle en pâtit.
Je m’adresse aux jeunes gens et aux jeunes filles en vous demandant de bien considérer les distinctions opérées par Jésus dans le choix de votre future profession. Sans aller jusqu’à vouloir gagner le monde, il est possible de faire des choix dont nous pouvons savoir qu’ils seront gravement invalidants pour la vie spirituelle. Il vaut la peine de calculer la dépense et de réfléchir sérieusement sous le regard de Dieu.
Aux adultes je demande de réfléchir sur les enjeux. Si nous connaissons des contraintes incontournables, ne nous est-il pas possible cependant de changer des choses dans notre manière de vivre ? Ne pouvons-nous pas apprendre le contentement, à l’opposé de la culture « de la gagne » ? Sommes-nous prêts à vivre avec « 100 » si cela suffit à nos besoins et à ceux des nôtres, plutôt que de vouloir « 150 » si cela met en danger notre vie spirituelle ?
Concluons en allant dans l’épître aux Hébreux, au chapitre 12 et au verset 16. Le Saint Esprit nous demande de veiller (verset 15) à ce qu’il n’y ait pas de profane comme Ésaü. Il me semble que le profane ne distingue plus les choses : le droit d’ainesse et un repas, la nourriture qui périt et celle qui subsiste pour la vie éternelle, la terre et le ciel, ce siècle ci et le siècle à venir. Pour lui, dans la pratique, tout s’ équivaut. C’est ainsi que le chrétien profane ressemblera (hormis les péchés grossiers) à Monsieur tout le monde. Laissons les distinctions faites par Jésus parler à notre coeur. Puisqu’il est question d’Esaü, je rappelle encore ceci pour finir : la Bible relate que lorsqu’Ésaü est revenu des champ il était accablé de fatigue. Ce n’est pas cette fatigue qui l’a rendue profane, mais elle a été l’élément révélateur dans cette circonstance de l’état de son coeur. Nous pouvons être fatigués, mais nous devrions suffisamment veiller sur nous pour ne pas prendre l’habitude de fermer nos Bibles et de supprimer la prière, comme si ces choses étaient de moindre importance. Nous qui avons reçu la vie véritable, voyons où sont nos priorités et veillons sur nous-mêmes.