Pascal COLLET
Nous lisons dans l’épître aux Galates, au chapitre cinq le verset 16, puis le verset 22. Comme nous l’avons dit lors de nos réunions d’études bibliques du jeudi soir, marcher selon l’Esprit est à la fois marcher en accord avec le Saint Esprit, et marcher par sa puissance. Cette marche là produit le fruit de l’Esprit, et nous insistons là-dessus : il s’agit d’un fruit produit par le Saint Esprit. Nous n’allons donc pas chercher ce fruit en nous-mêmes. Nous n’allons pas non plus entrer dans la confusion exprimée par exemple par Jésus dans l’Évangile de Matthieu, au chapitre cinq et au verset 46. Aimer quand tous nous aiment n’est pas le fruit du Saint Esprit ; montrer de la patience quand il n’y a pas à attendre n’est pas le fruit du Saint Esprit ; être dans la paix quand tout va bien n’est pas le fruit du Saint Esprit. Ces attitudes sont davantage le fruit des circonstances. Il ne s’agit bien sûr pas de rejeter ces choses : Paul écrit aux Philippiens que le don qu’ils lui ont fait parvenir a suscité en lui une grande joie ( 4/10). Ce n’est pas être spirituel que de rechercher des circonstances défavorables ; nous prenons ce que la main de Dieu nous donne, et si nous sommes au bénéfice de quelques circonstances favorables : tant mieux. Mais le fruit du Saint Esprit ne dépend pas des circonstances favorables : c’est un fruit surnaturel. N’y a-t-il pas contradiction dans les termes ? Le fruit évoque la semence puis le processus de la vie ; » surnaturel » dépasse ce qui est miraculeux : ce mot décrit tout ce qui n’est pas naturel. En ce sens, le fruit du Saint Esprit est bien surnaturel.
En ce sens aussi, la vie chrétienne est surnaturelle : il n’y a pas de marche selon l’Esprit sans naissance de l’Esprit (ou encore : naitre de Dieu ; être engendré par la vérité ; être régénéré par le Saint Esprit). Cette œuvre est l’œuvre de Dieu répondant à la repentance de l’être humain. Il y a certes quelques fois des dispositions favorables chez certains êtres humains, dues la plupart du temps à leur éducation. Naufragés sur l’île de Malte, Paul et ses compagnons d’infortune ont eu le privilège de rencontrer des barbares qui leur ont témoigné une bienveillance peu commune ( Act 28/2). Ces barbares n’étaient pas des disciples de Jésus ; ils ont pourtant montré une réelle bienveillance, mais celle-ci est désignée comme : peu commune. Ceci est d’autant plus vrai que nous sommes dans les derniers jours, annoncé comme des temps difficiles à cause du caractère des êtres humains tel qu’il est décrit dans la deuxième épître à Timothée, au chapitre trois, et aux versets deux à quatre. Mais même lorsque de bonnes dispositions existent chez l’être humain, avec le fruit du Saint Esprit nous allons plus loin.
Voilà ce que je crois pouvoir dire : le fruit de l’Esprit sera souvent une évidence spirituelle malgré les circonstances. J’illustre ceci avec un court texte qui se trouve au Psaume 27, et au verset trois. Je souligne l’expression : « malgré cela ». La paix était là où on ne l’attendait pas, à cause des circonstances difficiles. Humainement, naturellement, quand sommes-nous en paix ? Quand les circonstances sont favorables ; quand le pronostic d’une situation ou d’un état est bon ; quand les atouts sont réels et nombreux. Mais dans la situation évoquée ? Il n’y a rien de tout ça, et pourtant le psalmiste est en paix. Voilà ce que produit la vie surnaturelle du Saint Esprit en nous. Joni Erikson Tada a connu ce genre de paix après l’accident de plongée qu’il l’a laissé tétraplégique ; Corrie Ten Boom aussi, dans un camp d’extermination nazie ; Élisabeth Elliot également, quand elle commença à témoigner de sa foi dans la tribu indienne qui avait auparavant massacré son mari et ses compagnons de mission.
Voici ma définition de la paix : la paix n’est pas l’absence de trouble, mais la présence consciente d’un calme surnaturel produit dans nos cœurs par le Saint Esprit.
La même chose pourrait être dite des autres facettes du fruit du Saint Esprit : c’est cela qui explique la joie mentionnée dans les épîtres dites de la captivité. Paul ne se réjouissait pas de la captivité, mais il connaissait la joie du Saint Esprit malgré la captivité.
Ainsi, l’amour fruit du Saint Esprit se manifestera malgré… toute contrariété, toute opposition. La bienveillance fruit du Saint Esprit se manifestera malgré l’individualisme qui amène chacun à se préoccuper d’abord de lui. La fidélité se manifestera malgré les atteintes nombreuses à l’autorité de la Parole de Dieu, et dans sa dimension de relations avec le prochain, malgré que l’air du temps dévalue complètement la valeur des engagements, y compris celui, sacré, du mariage. Pour le disciple de Jésus, le « oui » veut dire quelque chose ! La maîtrise de soi, fruit du Saint Esprit se manifestera malgré tout ce qui nous pousse à l’excès, à l’intempérance, et pas seulement dans le domaine de la sexualité, mais aussi dans celui des émotions, des paroles et même de la technologie, puisqu’il est avéré que les dernières trouvailles technologiques provoquent de sévères dépendances.
Il s’agit bien d’un tempérament marqué et gouverné par le Saint Esprit. Il s’agit bien du fruit du Saint Esprit. Nous n’avons aucune illusion à nous faire sur la capacité à vivre ces choses naturellement : nous en sommes totalement incapables. Mais nous avons là le programme divin pour tous les disciples de Jésus. Pour que ce programme se réalise, offrons-nous à Dieu comme l’argile s’offre au potier. Et puis, n’oublions pas que nous avons pour arme la croix dans ce combat contre la chair. J’ai évoqué l’emprise de la chair et de ses désirs qui avaient amené des chrétiens de Corinthe à se faire des procès pour des affaires de cette vie. Réécrivons cette histoire non avec un scénario de science-fiction, mais avec le scénario de la marche selon l’Esprit : au milieu même des tumultes provoqués par ces différents, l’une des deux parties au moins aurait pu entendre les désirs du Saint Esprit dans cette affaire. Suivant les mots même de l’apôtre Paul ( 1 Cor 6/7), cette partie aurait pu porter la croix sur ce sentiment d’injustice, sur cette volonté d’avoir raison contre l’autre à tout prix, sur ce cri de vengeance peut-être, ceci non seulement pour éviter les œuvres de la chair (et le témoignage désastreux porté contre l’Évangile), mais aussi pour vivre étonnamment la manifestation du fruit du Saint Esprit, dans la paix, la maîtrise de soi, la douceur, l’amour et ce, malgré tout.
Un fruit porté non pas à cause des circonstances, mais malgré les circonstances.