Pascal COLLET
Nous lisons dans le premier livre des Chroniques, au chapitre 21, les versets 18 à 26.
Suite au dénombrement entrepris par David, le jugement divin s’abat. David reconnaît sa faute, et, sur l’ordre de Dieu, recherche un lieu pour y bâtir un autel et y offrir des holocaustes. Voilà le préalable à notre texte, dont nous retenons la fin du verset 24. Ornan était prêt à offrir à David tout ce dont il avait besoin, et c’est à cette occasion que David a répondu qu’il n’offrirait pas à Dieu ce qui ne lui coûtait rien. D’un côté donc, nous avons cette position choisie par David, et de l’autre nous avons la position de l’homme naturel qu’on peut énoncer de la façon suivante : je n’offrirai pas à Dieu ce qui me coûte quelque chose (étant bien entendu qu’il n’est pas seulement question d’argent).
Écartons d’emblée les motivations impures qui ne doivent pas être les nôtres pas plus qu’elles n’étaient celles de David : tout ce qui touche à l’orgueil poussant à rechercher « par le coût » une forme de gloire humaine ; tout ce qui a avoir avec un marchandage : payer pour avoir prise sur Dieu. Or, nous savons que Dieu a choisi de traiter avec l’être humain sur la base de sa grâce. Après avoir écarté ces motivations, que reste-t-il ? Ce geste démontre la valeur de Dieu pour David, et ce, d’une façon concrète. Il avait une telle considération pour Dieu qu’il lui semblait impossible de lui offrir ce qui ne lui coûtait rien. Il avait une grande estime pour Dieu (au sens premier : détermination de la valeur de quelqu’un). À l’inverse, c’est avec une ironie caustique et triste que Dieu parle au prophète Zacharie du prix magnifique auquel il a été estimé : 30 sicles d’argent, le prix d’un esclave ( 11/12) !
Allons maintenant dans le livre du prophète Malachie, au chapitre premier et au verset huit. Les israélites célébraient un culte ! Ils y apportaient leurs offrandes, mais sans honorer Dieu ce qui est pourtant le sens du culte. Que pense Dieu de ceci ? Lisons le au verset six. Cette manière de voir, qui est celle de Dieu, est juste. Le gouverneur, en voyant que ce qu’on lui offrait était finalement le rebut des biens du possesseur, aurait conclu comme il fallait conclure ! On reconnaît la valeur de Dieu à ce que nous lui donnons.
Quoi lui donner ? Tout d’abord, notre cœur. Nous le donnons trop facilement au monde et à son prince, aux convoitises mondaines, aux valeurs d’ici-bas, à des choses viles qui nous rabaissent. Dieu est honoré quand nous décidons de lui donner notre cœur, quel que soit par ailleurs l’état de celui-ci. Donner son cœur, selon la terminologie que nous connaissons bien, est assurément le point de départ d’une vie de communion avec Dieu. Dans cette vie là, nous allons être invités si Dieu compte pour nous à lui donner du temps. C’est là une chose de valeur, puisqu’elle est rare, vu que, c’est bien connu, nous en manquons ; nous n’en avons pas. Ce qui est rare est donc de valeur. Je pense à quelques-unes de nos activités d’église : la prochaine journée des enfants, à laquelle travaille déjà depuis des mois une équipe de frères et de sœurs, qui ne comptent pas leur temps pour la réussite de cette rencontre ; à la retraite spirituelle de l’été pour laquelle nous avons besoin d’une équipe de service, qui est constituée depuis des années par des frères et sœurs qui donnent des jours, y compris en posant des jours de congé pour servir le Seigneur et leur prochain. Ces jours qu’ils donnent, ils ne les ont plus pour eux. Y aura-t-il un avenir à toutes ces œuvres qui réclament qu’on donne à Dieu ce qui peut nous coûter ? Et puis, il faut aussi mentionner cette « chose » que nous gardons précieusement tellement nous y sommes attachés et que nous pourrions offrir à Dieu ; ce match sportif, ce concert musical, ce repas d’anniversaire qui prennent la place des réunions ou du service pour Dieu… ce samedi pour jeûner avec l’église…
Si je cite ces faits concrets, c’est qu’avec eux, nous constituons la trame de notre existence, et donc notre personnalité. Il est bien entendu que nous offrons à Dieu ce que nous pouvons offrir : lisons dans la deuxième épître aux Corinthiens, au chapitre huit, le verset 12. Ne vous engagez pas dans un service pour Dieu si vous n’avez réellement pas le temps de bien l’assumer.
« Mais ça me coûte ! » Eh bien, c’est justement de cela dont il est question ce matin. Je n’offrirai pas à Dieu ce qui ne me coûte rien.
Avez-vous déjà entendu le témoignage divin donné à Abraham alors que celui-ci avait accepté d’offrir Isaac son fils ? Lisons dans le livre de la Genèse, au chapitre 22, le verset 12. Tu ne m’as pas refusé…
Les refus affirmés sont rares ! Des « stratégies de diversion » existent : elles sont moins voyantes, mais le résultat est le même. Regardez par exemple avec moi dans l’Évangile selon Luc, au chapitre neuf, les versets 59 à 62. Les réponses de Jésus sont propres à scandaliser quand on les lit telles qu’elles sont. Le premier homme ne refuse pas de suivre Jésus : il lui répond: permet moi d’aller d’abord ensevelir mon père. Avez-vous remarqué ce qui ressort de cette phrase ? Moi… d’abord. Voilà la diversion. Pas un non catégorique, mais un oui sous condition, et la condition c’est que nous passions avant le Seigneur. Bien que je n’ai pas choisi d’évoquer ce matin ce que rapporte spirituellement la consécration, ayant choisi de m’arrêter sur le coût, je veux en écho à notre dernière lecture mentionner l’attitude inverse, trouvée longtemps avant chez une pauvre veuve, chargée par Dieu de s’occuper du prophète Élie. Lisons dans le premier livre des Rois, au chapitre 17, et au verset 13. Elie dit bien : prépare moi d’abord un petit gâteau… Évidemment, il ne fait pas parti des prédicateurs rapaces qui tondent les brebis et s’enrichissent à leurs dépens ! Pour la veuve pauvre, quelle épreuve de la foi ! Avec toutefois une promesse que nous trouvons au verset suivant. Offrant à Dieu ce qui lui coûtait, cette femme a ouvert la porte au miracle dans sa maison.
Je termine maintenant avec la lecture d’un dernier texte, qui se trouve dans l’épître aux Éphésiens, au chapitre cinq, les deux premiers versets. Nous avons là ce qui explique le grand renversement évoqué au début de cette prédication : l’homme naturel dit : je n’offrirai pas à Dieu ce qui me coûte ; l’homme spirituel dit : je n’offrirai pas à Dieu ce qui me coûte rien. Ce renversement s’explique par l’œuvre de Jésus-Christ à la croix du calvaire. David Livingstone disait : « je n’ai jamais fait de sacrifice. Les gens parlent du sacrifice que j’ai fait en passant une grande partie de ma vie en Afrique. Mais peut-on encore appeler sacrifice ce qui n’est en fait qu’un tout petit remboursement de l’immense dette de reconnaissance que nous devons à Dieu ? » Une source a été ouverte à la croix : d’abord source de salut, de pardon, de guérison, de délivrance, de justice. Mais cette source ouverte est aussi une source de consécration pour ceux qui sont au bénéfice du sacrifice de Jésus. Quelles idées avons-nous de l’exhortation du verset 2 à marcher dans l’amour ? Peut-être pensons-nous qu’il faut être aimables à la fin du culte pour saluer poliment les uns et les autres ? C’est effectivement une bonne chose, mais ce n’est pas le sens de ce texte. Marcher dans l’amour, c’est marcher à l’exemple de Christ et ce, dans le fait précis qui est mentionné dans le texte, à savoir que Jésus nous a aimé et qu’Il s’est livré lui-même à Dieu pour nous comme une offrande et un sacrifice de bonne odeur. Voilà l’exemple de Christ placé devant nous dans ce texte, et c’est un exemple de consécration à Dieu, d’une consécration qui coûte, et qui donc démontre la valeur que Dieu a dans la vie de son Fils, et dans la nôtre s’il y trouve le même esprit de consécration.
À la lumière de l’œuvre de la croix, ne voulons nous pas dire avec David : je n’offrirai pas à Dieu ce qui ne me coûte rien ?