Pascal COLLET
Nous lisons dans l’Évangile selon Luc, au chapitre 14, les versets 15 à 20.
Le texte parallèle, semblable n’est pas identique, indiqué par nos Bibles est celui de l’Évangile selon Matthieu, au chapitre 22, où il est précisé au verset deux que c’était un roi qui fit des noces pour son fils.
Au strict plan humain tout d’abord, deux éléments pourtant importants n’ont pas joué chez les invités : la crainte de déplaire au roi, et l’honneur d’être invité. Maintenant, si nous considérons que « l’invitant » de la parabole est Dieu, nous avons un tableau encore accentué ! Comment se fait-il qu’un champ, des boeufs et même un mariage passent avant Dieu ? Aient plus d’importance que Dieu ? La chose n’est évidemment pas affirmée, mais le choix la prouve.
Notre histoire avec Dieu commence aux premières pages du livre de la Genèse par cette parole : « faisons l’homme à notre image, selon notre ressemblance…» (Gen 1/26). Dès cet instant, nous pouvons être certains que nous sommes faits pour Dieu. Non pour le mysticisme, non pour la vie monastique, non pour la religion mais pour être en communion avec Dieu. Or trop souvent, Dieu n’est considéré au mieux que comme une roue de secours dans le besoin, ou comme un personnage gênant amenant par exemple certains à reculer devant ce qu’il faudrait abandonner pour être en communion avec Lui. D’autres encore sont contre Lui.
Le curieux point culminant de notre histoire avec Dieu, c’est la croix où le propre Fils de Dieu se livre pour nos péchés, croix suivie du tombeau vide. Quelle intervention étrange et forte à la fois de Dieu dans l’histoire qu’il voudrait nouer avec nous ! Mais cette histoire ne s’arrête pas là : un rendez-vous est fixé à tous les êtres humains, rendez-vous différent selon notre état spirituel, mais rendez-vous incontournable : le jugement du grand trône blanc,, où le tribunal de Christ. Avons-nous pris l’exacte mesure de tout cela ?
On peut dire des invités de la parabole qui n’ont pas donné suite à l’invitation royale qu’ils ont été divertis, c’est-à-dire au sens étymologique du terme : détournés. Détournés de l’essentiel.
Essayez d’imaginer l’existence des occidentaux sans divertissement : cela paraît quasiment impossible à imaginer ! De quoi parle-t-on à la pause au travail ? De la dernière émission de télé réalité, de « danse avec les stars », ou de tout autre fait ?
Par quoi pouvons-nous être divertis c’est-à-dire détournés de l’essentiel ? Lisons dans l’Évangile selon Matthieu, au chapitre 13, le verset 22. Nous pouvons être divertis par la séduction des richesses, et les soucis de ce siècle. Lisons un autre texte, un peu plus troublant, dans la première épître aux Corinthiens, au chapitre sept, les versets 29 à 31. Paul ne prêche ni l’indifférence des stoïciens, ni la fuite dans un monde imaginaire, mais l’attitude juste d’un coeur devant les choses de l’existence, y compris les bonnes ! Car les bonnes choses peuvent aussi nous divertir ! Il en est ainsi des fiançailles ou du mariage : le verset 29 doit être compris à la lumière de tout l’enseignement biblique sur le mariage. Il ne signifie donc pas qu’à un moment donné, le mariage perdrait sa validité. Il n’invite pas davantage à la cessation de la vie commune au prétexte que le temps qui nous sépare du retour de Jésus est court. Il n’invite pas à l’abstinence physique dans le mariage. Ce sont d’autres textes que je ne cite pas qui nous permettent d’éliminer ces fausses pistes. Mais même ce lien unique et voulu de Dieu doit être vécu sans qu’il puisse nous détourner de l’essentiel. Quant au verset suivants : dans l’existence, nous rencontrerons des peines, mais ne nous laissons pas dominer par la douleur Nous rencontrerons des joies, mais ne nous laissons pas étourdir par la joie. Nous pourrons faire des affaires, acquérir, investir mais jamais au détriment de l’essentiel.
Lisons maintenant un dernier texte pour répondre toujours à la question de savoir ce qui peut nous divertir, dans l’épître aux Galates, au chapitre cinq, les versets sept et huit. Ces chrétiens couraient bien spirituellement, et ils ont été arrêtés dans leur course. Par quoi ? Par une influence, c’est-à-dire l’action qu’exerce une chose, une situation, une parole. J’écarte ce matin l’influence provenant de personnes bien que le fait soit avéré, pour ne retenir que cette pensée : un fait, un comportement, une parole suffit pour nous divertir. Et lorsque nous laissons ce fait, ce comportement, cette parole s’établir dans nos coeurs et nos pensées, alors c’est comme si Dieu ne comptait plus, c’est comme si la croix ne signifiait plus rien, c’est comme si la résurrection n’existait pas, c’est comme si nous n’avions pas les uns et les autres un rendez-vous fixé avec le Seigneur. Des faits peuvent être blâmables et même condamnables, des situations peuvent être anormales, mais ceci ne devraient pas nous divertir. J’ai repensé à l’apôtre Paul et notamment à son dernier écrit,, dans la deuxième épître adressée à Timothée, au chapitre quatre. Pourquoi demande-t-il à Timothée de venir au plus tôt vers lui ? (v 9). Parce que Démas l’a abandonné par amour pour le siècle présent. Et aussi, parce qu’Alexandre le forgeron lui a fait beaucoup de mal. Et encore, parce que dans sa première défense personne ne l’a assisté, mais tous l’ont abandonné. ( v14 et 16). Voilà des faits. Ils sont blâmables. Certains pourraient en faire leurs « choux gras » en disant : « c’est ça l’église » ! Et ce faisant, ils auraient matière à être divertis. Mais tel n’a pas été la réaction de l’apôtre : il est quand même paradoxal que ce soit dans ce contexte peu glorieux qu’une parole dite par lui ait été tant de fois reprise depuis pour encourager les chrétiens, ou pour signifier lors de leur inhumation qu’ils sont morts en vainqueur. Cette parole est celle du verset sept : « j’ai combattu le bon combat, j’ai achevé la course, j’ai gardé la foi ». Et puis, quel souffle dans ses ultimes paroles ! Nous n’avons pas affaire à un homme amer ; il ne s’est pas laissé divertir, et ceci l’a amené à expérimenter une grâce supplémentaire venant du Seigneur Jésus, indiquée aux versets 17 et 18.
Certains galates s’était donc arrêté dans la course chrétienne ; on peut aussi être diverti alors qu’on s’apprêtait à entrer dans cette course. Une parole malheureuse, un comportement blâmable … Et voilà que tout est remis en cause !
La personne divine est la personne la plus importante et la plus précieuse qui soit pour nous. Le grand dessein de Dieu est la chose la plus importante et la plus précieuse qui soit pour nous, alors ne nous laissons pas divertir par quoi que ce soit.