Entre la satisfaction et la griserie, le mur, s’il en existe un, semble bien fragile et perméable. Oui quand la satisfaction est un vrai bonheur, une joie saine, un contentement normal, mais non à la griserie, cette légère exaltation physique comparable aux premières impressions de l’ivresse selon le dictionnaire Petit Robert. Non à la griserie qui nous emporte et nous fait perdre une mesure de retenue ; non à l’euphorie capable de nous aveugler momentanément.
Au jour de la Pentecôte, lorsque la foule pensait que les disciples étaient pleins de vin doux, l’apôtre Pierre apporta vite un démenti (Act. 2/13-15).
Une profonde satisfaction nous pousse à la louange envers le Seigneur et peut nous accompagner dans la réussite de nos entreprises, mais veillons à ce qu’une légère expression de griserie ne vienne nous étourdir, altérer notre jugement et mettre à notre compte une part de gloire qui doit revenir à Dieu. N’est-ce pas ce qui est arrivé à l’homme riche de la parabole ? Que disait-il après sa réussite, et surtout dans quel état d’esprit le disait-il ? « Voici ce que je ferai ; J’abattrai mes greniers, j’en bâtirai de plus grands, j’y amasserai toute ma récolte et tous mes biens ; et je dirai à mon âme : Mon âme, tu as beaucoup de biens en réserve pour plusieurs années ; repose-toi, mange, bois, et te réjouis » (Luc 12/18-19).
Ne ressentons-nous pas une certaine ivresse dans ses propos ? N’est-il pas préférable de se réjouir humblement en rendant honneur et gloire à Dieu ?
C’est fréquemment après une action réussie que l’ennemi de nos âmes essaye de communiquer le trouble, après un témoignage rendu et porteur d’un fruit réjouissant, un résultat particulier dans notre travail, une promotion qui nous apporte une mesure de reconnaissance pour notre activité.
A leur retour de mission, Jésus dut tempérer l’enthousiasme des soixante-dix envoyés.
« Les soixante-dix revinrent avec joie, disant : Seigneur, les démons mêmes nous sont soumis en ton nom. Jésus leur dit : Je voyais Satan tomber du ciel comme un éclair… Cependant, ne vous réjouissez pas de ce que les esprits vous sont soumis ; mais réjouissez-vous de ce que vos noms sont écrits dans les cieux » (Luc 10/17-20).
Je souhaite à chacun la réussite dans ses entreprises, dans l’apport de son témoignage, dans l’œuvre qu’il réalise, spirituelle et matérielle, la bénédiction pour toutes celles et tous ceux qui l’entourent, beaucoup de bonheur et de joie, de dynamisme et de perspectives de projets, mais tout cela dans une saine mesure, en n’oubliant pas que sans le Seigneur, nous ne pouvons rien faire. Dieu pourrait se passer de nous. Il nous accorde le privilège de sa présence et de son aide.
En finalité, disons simplement : « nous avons fait ce que nous devions faire » (Luc 17/10).
Laurent Van de Putte