Pascal COLLET
Il y a quelques semaines, nous nous sommes arrêtés sur la question suivante : que peut-il se passer pendant la prédication fidèle de la Parole de Dieu ? Aujourd’hui, posons une question un peu similaire : que peut-il se passer pendant la prière ? Nous avions fait référence à l’expérience faite par Corneille, c’est encore notre référence pour ce matin, et nous allons donc lire dans le livre des Actes des apôtres, au chapitre 11, le verset cinq. « Pendant que je priais » dit Pierre. Pendant la prière, Pierre a donc reçu une vision véritable qui fut la première étape pour le salut des non juifs. Bien qu’étant un homme spirituel, Pierre n’était pas un homme » à vision », mais celle-ci lui fut donnée par Dieu pendant qu’il priait. Ajoutons un deuxième texte que nous trouvons dans le livre de Daniel, au chapitre neuf, les versets 20 à 23. Ici, pendant la prière, nous avons l’intervention d’un ange ! Ce n’est pas quelque chose d’habituel, et ce n’est donc pas quelque chose que nous devons rechercher, même si Dieu peut toujours agir par l’intermédiaire de ses anges. Après tout, Daniel priait trois fois le jour (ceci était une habitude), sans qu’il soit mentionné une intervention angélique systématique. Mais alors, pourquoi choisir d’emblée deux textes relatant des faits inhabituels ? J’ai effectivement choisi ces deux textes parce qu’ils nous placent devant la prière en relation avec la communion avec Dieu : deux personnes se retrouvent ensemble, une personne humaine est la personne divine, et il y a dans la prière partage et échange entre les deux.
Lisons encore le texte qui se trouve dans l’Évangile selon Luc, au chapitre trois, les versets 21 et 22. À cette occasion, deux choses se sont produites : Jésus a été au oint du Saint Esprit, et un témoignage divin a été porté du ciel. Ceci s’est produit pendant que Jésus priait. Le ciel s’est ouvert. Un ciel fermé peut désigner l’état de non communion avec Dieu. Pour nous, si c’est le cas, et même si nous prions Dieu, Jésus ne nous sert donc de rien : lui qui est venu du ciel sur la terre porter nos péchés sur la croix, qui est remonté de la terre au ciel pour nous ouvrir une route nouvelle et vivante jusque dans la présence de Dieu qui est le vrai sanctuaire aujourd’hui ! La prière « au nom de Jésus » n’est pas une formule, mais l’appropriation d’un fait : je ne peux avoir accès à Dieu en dehors de Jésus. Si vous n’êtes pas convaincus de cela, je vous propose une petite expérience que vous pourriez faire par exemple demain, à l’occasion du rassemblement d’églises à Paris : entre les deux réunions, essayez donc d’entrer en présence du président de la république. Ce n’est qu’un homme, il n’est pas saint comme Dieu, mais sa fonction fait que, même si vous vouliez entrer en sa présence, vous ne le pourriez pas. Et vous pensez pouvoir vous approcher du Dieu trois fois saint en dehors du nom, c’est-à-dire de la personne et donc de l’œuvre de Jésus ? En dehors de la mort expiatoire de Jésus, de sa glorieuse résurrection et de son élévation en gloire, nos prières ne peuvent pas dépasser nos plafonds. Ainsi le ciel peut être fermé mais il n’est pas appelé à le demeurer : lisons dans le deuxième livre des Chroniques, au chapitre sept, les versets 13 et 14.
Lisons un autre texte dans l’Évangile selon Luc, au chapitre 22, les versets 39 à 44. Jésus priait. Il priait pour accomplir la volonté de Dieu. Dans la prière (et pas seulement par elle), il fut fortifié du ciel, non pour échapper à la souffrance, mais pour y faire face. Quel contraste entre son attitude devant « la puissance des ténèbres » ( v53), et celle de ses disciples ! Chez lui, du courage, de la maîtrise de soi, de la force intérieure, de la connaissance de ce qui doit être fait ; chez ses disciples, après une malheureuse tentative avec une épée pour le défendre, tous l’ abandonnèrent et prirent la fuite. Pourquoi ce contraste ? Pendant qu’il priait, Jésus fut fortifié. Ne priant pas, ses disciples ne furent pas fortifiés. Nous mentionnions jeudi soir dernier le texte où Paul dit qu’ après avoir souffert et reçu des outrages à Philippe, il a pris de l’assurance en Dieu pour annoncer l’Évangile aussi à Thessalonique ( 1 Thes 2/2). Comment a-t-il pu prendre de l’assurance ? N’est-ce pas, comme le relate le récit des Actes, en priant et en chantant les louanges de Dieu vers le milieu de la nuit alors qu’il était emprisonné avec Silas ( Act 16/25) ?
Les Psaumes sont des prières. Ils prennent souvent naissance dans l’existence des psalmistes, et c’est ainsi que plusieurs notent d’abord les épreuves, le désespoir, les dangers, la peur, la faiblesse humaine, et puis, pendant que la prière continue, le « tableau » change. Prenons un exemple avec le Psaume trois. Entouré d’ennemis, privé de son armée, chassé de son trône, on comprend les voix que David entend au verset trois ! Mais bientôt, les réalités spirituelles prennent le dessus en son cœur et dans ses pensées : à tout ce qui le désespère il oppose la personne de Dieu ( Mais Toi ô Éternel v4) et pendant qu’il prit, une réelle évolution s’opère dans son cœur. Et ceci n’est pas de la psychologie ! Ça peut faire du bien de parler à quelqu’un de ses soucis et de ses peines, mais ici nous avons autre chose : pendant qu’il prie Dieu, Dieu se révèle à nouveau à lui, et il s’ensuit une paix qui surpasse toute intelligence, de la clarté spirituelle, des pensées recentrées et ordonnées, la force du Saint Esprit, l’assurance pour faire face à toute situation. Et tout cela, pendant la prière.
Lisons un dernier texte qui se trouve dans le livre des Actes des apôtres, au chapitre premier, le verset 14, puis au chapitre deux, le verset premier et le verset quatre. Les disciples persévéraient dans la prière. C’est donc dans la prière que le moment est arrivé pour Jésus d’envoyer le Saint Esprit dans leur cœur à la Pentecôte. Ils priaient…
En rassemblant ces textes, j’ai pensé à nos moments personnels dans le lieu secret avec Dieu, et à nos moments de prière ici dans cette salle. Que se passe-t-il pendant que nous prions ? Après les textes cités, c’est avec une forme d’effroi que je vais dire ce qui suit : il est possible que le temps de la prière soit comme un « grand blanc », que finalement il ne soit rien, puisqu’on attendrait simplement que ce temps se passe. Il est possible qu’il n’y est pas ce recueillement qui est lié au partage dans la prière. Le prophète écrivait : « mon âme te désire pendant la nuit, et mon esprit te cherche au dedans de moi… »( Esa 26/9). Voilà ce qui devrait caractériser nos moments de prière, outre l’élévation de notre voix vers Dieu : notre esprit le cherchant, et alors, nous avons part à la communication du Saint Esprit pendant que nous prions.
Avez-vous noté le fait suivant : il arrive que dans des rassemblements, si nous voulons avoir le silence, il suffit d’annoncer que nous avons un temps de prière. En disant cela, je ne rabaisse pas la prière adressée à Dieu au rang d’une conversation humaine voire d’un bavardage, mais je souligne par ce fait concret, que nous avons besoin d’être vigilants pour la prière, et pendant la prière.
Quelqu’un ici ne vit-t-il pas ce qui a été indiqué sommairement ce matin ? Il est possible que l’ignorance ou l’inattention l’aient conduit à une pratique de la prière qui ne correspond pas à ce que les textes bibliques ont placé devant nous ce matin. Il est aussi possible qu’il s’agisse d’un état de non communion avec Dieu, auquel cas, il faut rapidement revenir à lui pour retrouver son cœur, ses pensées et son Esprit.