Pascal COLLET
Nous lisons dans le premier livre des Rois, au chapitre 18, les versets 20 à 22.
Nous sommes avec ce récit dans un temps difficile : il y a une sécheresse prolongée qui entraîne une famine ; la haine de Jézabel et ses desseins meurtriers à l’égard des prophètes de Dieu ; un état spirituel du peuple déficient. Comment imaginer ce grand rassemblement, avec d’un côté 450 prophètes de Baal, de l’autre un homme seul, Elie le prophète de Dieu, et entre les deux le peuple d’Israël ? Comme tous prophètes, Elie annonce de la part de Dieu une parole qui stimule, fâche, dérange, place l’être humain « au pied du mur » dans un désir de salut. « Clocher des deux côtés » ce qui pourrait signifier selon certaines traductions « sauter d’un pied sur l’autre » en référence aux danses accompagnant les cultes idolâtres ; ou plus probablement, pour faire ressortir la terrible indécision du peuple.
Le peuple ne lui répondit rien. Imaginez la scène : ce silence… A-t-il duré quelques secondes ? Quelques dizaines de secondes ? Ce silence n’est pas un de ces bons silences qui vaut toujours mieux que des mauvaises paroles ; il n’est pas non plus un silence chargé de la présence de Dieu. Devant une question d’une simplicité désarmante (Qui est Dieu ?), le peuple même de Dieu, qui a reçu sa révélation n’a rien à répondre ! Je pense à certains de nos silences, quand nous n’avons rien à dire à Dieu, lui qui nous parle pourtant par la Bible, appelée aussi Parole de Dieu !
Pourquoi ce silence ? La première raison est que le peuple n’avait rien de valable à répliquer : pas d’arguments valables. Jésus appellera Dieu, bien après cette scène « le seul vrai Dieu » ( Jean 17/3). La deuxième raison est que la question d’Elie les plaçait dans l’embarras par rapport à leur vécu.
Nous pouvons dire la chose suivante, en ayant conscience que nos paroles doivent être vraies : il y a toujours quelque chose à répondre à Dieu. Même dans l’embarras : pourquoi y demeurer ?
« Dis tout à Jésus » dit un de nos vieux cantiques. Il vise à nous encourager à faire de Jésus le confident aimant avec qui nous pouvons partager nos peines, nos douleurs, nos inquiétudes. Mais nous pouvons aussi Lui dire nos tiédeurs, nos tiraillements, notre mauvaise santé spirituelle, ou encore le fait que nous ne vivons pas ce qui est prêché. Le dire n’est pas encore « posséder », mais c’est une étape pour vivre autre chose.
Nos réponses à Dieu pourraient avoir la forme de certaines réponses que nous trouvons dans la Bible.
« Dieu a trouvé l’iniquité de tes serviteurs ». C’est Juda qui parle ainsi à Joseph. Cet aveu rare est conforme à la réalité. Ainsi pouvons-nous nous aussi signifier à Dieu que nous sommes concernés par ce qu’Il nous dit, que nous comprenons que c’est pour nous, que c’est réellement comme ça.
« C’était donc vrai… » ! C’est la reine de Séba qui parle ainsi à Salomon. Il y a une forme d’émerveillement dans cette parole, émerveillement qui est aussi notre part devant le dessein de Dieu, et la certitude qu’Il l’accomplit dans nos vies. La parole de la foi citée dimanche dernier n’est-elle que pour acquérir le salut ? Elle est aussi pour la vie chrétienne dans son développement et sa croissance. Saisissant les promesses de Dieu pour notre piété, nous offrant à lui pour qu’Il accomplisse ce qui peut sembler irréel (par exemple une vraie sainteté de vie dans le temps d’aujourd’hui), voyant déjà les prémices de son oeuvre, saluons là avec émerveillement après l’avoir demandé avec soif.
« Nous voici, nous allons à toi, car tu es l’Eternel, notre Dieu ». Nous voici ! Ou encore : me voici ! Ainsi ont répondu Moïse, Samuel, Esaïe et tant d’autres… La manière la plus répandue de pratiquer l’esquive par rapport à l’attente de Dieu, c’est le silence de la non-réponse.
L’autre versant du récit de notre texte d’introduction nous amène maintenant au même chapitre, mais au verset 37. Il fallait que Dieu réponde ! L’autel rétabli, l’holocauste consumé par le feu nous ramènent à la croix de Jésus. Il est vrai que Jésus est la parfaite réponse de Dieu aux besoins de l’être humain, Lui, « la parole faite chair ». Quel contraste avec ce qui n’est pas Dieu : lisons les versets 26 et 29. Plus encore, le feu de la réponse divine pour nous fut celui du jugement de Jésus, lui-même !
Quelle réponse de Dieu ! Jésus nous révèle qui est Dieu ; la croix révèle dans une parfaite synthèse la sainteté et l’amour divin ; elle est aussi le signe intangible de la défaite et du jugement du diable ; elle est ce qu’il faut à l’être humain pour sa conscience, son coeur, sa vie ; elle permet l’action de Dieu sur le mal qui nous enveloppe si facilement.
Le feu de notre texte peut aussi évoquer selon la parole de Jean-Baptiste en Luc 3/16, cette expérience de la plénitude du Saint Esprit, qui fait que les ressources divines sont répandues sur la terre. Le disciple de Jésus apprend le vaste horizon de ces ressources divines : nous avons chanté ce matin ; savons-nous que chanter avec le Saint Esprit est plus que chanter ? Nous avons prié : avons-nous goûté l’assistance de l’Esprit de Dieu dans la prière ? Nous sommes confrontés avec les aspects nombreux et divers de ce que la Bible appelle la chair : pour y remédier, n’avons-nous pas une marche qualifiée de marche selon l’Esprit ?
La fin du verset 37 lu il y a quelques instants amène Elie à dire à Dieu qu’il doit ramener leur coeur. Leur silence témoignait que le coeur ne battait plus pour Dieu ; il fallait donc qu’il soit ramené à Dieu. A un peuple qui n’a pas répondu, Dieu quant à lui a répondu pour exaucer la prière du prophète solitaire. La magnifique réponse de Dieu pour nous en Jésus-Christ son fils n’est-elle pas là pour ramener nos coeurs ?