Nous voici en Afrique du Sud, après la fin de l’apartheid, dans le cadre des audiences de la commission gouvernementale « vérité et réconciliation ».
Lors d’une audience, un policier du nom de Van de Broek raconte comment lui et d’autres officiers avaient tué un garçon de 18 ans, puis avaient brûlé son corps en le faisant tourner sur le feu comme un barbecue pour faire disparaître toute preuve.
Huit ans plus tard, Van de Broek était revenu dans la même maison pour arrêter le père du garçon. L’épouse avait été forcée à regarder pendant qu’ils l’attachaient sur un tas de bois, jetaient de l’essence sur son corps et allumaient le feu.
Le silence remplit la salle d’audience avant que la vieille femme qui avait d’abord perdu son fils puis son mari, ait l’occasion de s’exprimer.
Le juge lui demanda : « Qu’attendez-vous de Mr Van de Broek ?
Elle répondit qu’elle voulait que Van de Broek retourne sur les lieux où le corps de son mari avait été brûlé pour y ramasser ses cendres afin qu’elle puisse lui faire des obsèques décentes. La tête penchée, le policier accepta.
Puis elle ajouta une autre requête : « Mr Van de Broek m’a pris toute ma famille et j’ai encore beaucoup d’amour à donner. Deux fois par mois, j’aimerais qu’il vienne me voir dans le ghetto et qu’il passe une journée avec moi afin que je sois pour lui comme une mère. Et je voudrais que Mr Van de Broek sache que Dieu veut lui pardonner et que je lui pardonne aussi. Je voudrais l’embrasser pour qu’il sache que mon pardon est réel. »
Spontanément, des voix s’élevèrent dans la salle d’audience en chantant « Amazing grâce » tandis qu’elle s’approchait de l’accusé. Van de Broek, toutefois n’a pas entendu le cantique. Il s’était évanoui sous l’émotion.
Pascal Collet